
Projet A vos graines
Interdisciplinaire, inter-niveaux, inter-établissements
Proposé par le collectif des Enseignant.e.s Pour La Planète
A VOS GRAINES
Constatant la rupture de plus en plus profonde qui sépare les élèves du monde végétal, le collectif Les Enseignants Pour La Planète propose qu’un potager en permaculture soit réalisé dès la rentrée dans tous les établissements scolaires français.
Il servira de support à l’identification des végétaux et à leur usage, mais aussi aux enseignements sur le monde vivant (pollinisation, génétique, importance du sol, eau, alimentation, déchets, énergie…) afin de sensibiliser les élèves sur ces questions de façon concrète : compostage, zéro-déchet, implantation de ruches et de vergers, poulailler… Les thèmes d’étude ne manquent pas.
Le jardinage permettra aussi aux élèves de travailler avec leur corps et d’acquérir des compétences citoyennes telles que la solidarité, l’entraide, le partage et le respect. Des travaux artistiques et littéraires pourront aussi utiliser le jardin comme support pédagogique.
Il permettra enfin de développer l’inclusion, l’égalité filles-garçons et les liaisons intercycles. Des partenariats avec la mairie, des maisons de retraite, des maraîchers bio ou des associations seront envisagés. Enfin, il s’agit de faire prendre conscience aux élèves que les potagers permettent un mode de vie résilient, c’est-à-dire de surmonter des crises, comme ce fut le cas dans le passé.
OBJECTIFS
– Reconnecter les élèves au monde vivant
– Faire des écoles un lieu de biodiversité
– Apprendre la résilience
– Développer le travail manuel et l’intelligence corporelle
NIVEAU
De l’école primaire au lycée
LA PREPARATION
1/ Formez-vous ! …auprès de jardiniers de votre entourage, sur internet, dans des livres, visitez un maximum de jardins et posez des questions. Méfiez-vous des conseils des jardiniers traditionnels qui retournent leur sol à la main ou avec une machine. Pire, s’ils utilisent des produits chimiques. Rapprochez-vous de ceux qui semblent vraiment connaître le fonctionnement du sol et les besoins des légumes. Avant d’écouter des conseils regardez leur jardin, il en dit plus long sur ce qu’ils savent. Mais ne vous fiez pas à une apparence « propre ». Une présence d’adventices régulés (« mauvaises herbes ») est un signe de connaissance de la permaculture. Observez aussi s’il fait des associations entre plantes, s’il pratique des rotations, s’il récupère son eau de pluie (récupérateurs), s’il y a un paillage (et qu’il peut expliquer ses choix de paillis), s’il y a une mare, des tas de branches, une présence de fleurs ou d ‘arbustes, ce sont des signes d’une maîtrise des principes de base de la permaculture.
Et surtout la meilleure école : créer votre propre jardin chez vous et expérimentez des choses, quelque soit la taille de votre terrain (du pot sur le balcon au jardin partagé). Si vous voulez-vous créer un jardin partagé au collège et ne connaissez-rien, rapprochez-vous de collègues qui ont un potager chez eux et demandez-leur de vous conseiller… Ils finiront peut-être par encadrer les ateliers.
2/ Préparez-vous à affronter les idées préconçues et les blocages : « il faut du temps, ça salit , ça n’a rien à voir avec les cours, c’est pour les écolos, on ne pourra pas arroser l’été, c’est du travail en plus pour les agents, les élèves ne vont pas être motivés, ça va coûter de l’argent, il faut retourner le sol, il faudra désherber, etc. »
3/ Préparez des arguments bétons pour engager les collègues et la direction. Conseil : pour que les collègues puissent se projeter, proposer des liens avec leur discipline et rassurez-les. Proposer plusieurs formules ( s’engager à l’année, un trimestre, juste une séance ou deux, en fonction des travaux, être seulement tenu informé), dialoguer avec l’administration : s’appuyer sur les 8 mesures du ministre ou ses recommandations à la rentrée, l’importance accordée à l’EDD au sein des programmes, expliquer que ça valorise l’image de l’établissement et améliore le climat scolaire. Demander d’abord l’autorisation du chef d’établissement afin d’avoir du poids si vous devez passer devant l’intendant…
LE LANCEMENT
Choisir l’emplacement du potager en tenant compte des indicateurs biologiques (présence d’une terre noire, aérée, de plantes sauvages, d’insectes) et de son orientation vers le sud ou l’est. Définir le type de potager en fonction de ces caractéristiques (en bac, en butte, taille des parcelles, …)
Fixer un créneau horaire : éviter les créneaux en fin de journée ou trop courts
Inviter les collègues à participer, contacter le Principal et l’intendant, en parler en plénière et en conseil péda. Demander éventuellement une aide financière (auprès des collectivités territoriales).
Discuter avec le chef au self pour récupérer les déchets verts et les composter.
Créer le « club nature » : diffuser le message aux élèves par affiches, par papiers, sur le site internet du collège et au sein de vos cours pour les intervenants. Créer une liste d’élèves et communiquez-la à la vie scolaire (attention au passage self et à l’appel)
Conseil : adopter une image « jeune » et attractive et non moralisatrice ou anxiogène. S’appuyer sur les exemples d’agriculture urbaine et des jardins partagés (incroyables comestibles)
PLANNING A L’ANNEE
Créer collectivement un planning de travail à l’année. Conseils pour l’année 1 :
– Automne : étude du lieu et préparation du sol (recouvrir d’une bâche, de cartons, de paille ou de tôle) – Hiver : Ateliers éco-brico en salle et formation avec des partenaires (maraîchers bio, assos…), créer un récupérateur d’eau de pluie et un compost (indispensables), une mangeoire pour les oiseaux, creusez une mare, laisser un tas de branche au sol pour les insectes et les hérissons – Printemps : semis et plants, utiliser un calendrier des semis. N’achetez pas de pots en plastiques : vous pouvez utilisez des boîtes à œufs, des rouleaux de papiers toilette, des cartons… Paillez. – Fin du printemps, début de l’été : premières récoltes
Achat du matériel : les possibilités (attention : moins vous achetez, plus c’est cohérent avec l’idée de résilience et de transition) – emprunter le matériel des agents s’ils veulent bien – apporter du matériel personnel (enseignants et/ ou élèves) – acheter d’occasion –
Sinon acheter en magasin (penser au FSE) et comptez environ 500 euros pour se lancer avec du matériel neuf : grelinette, 2 houes, griffe, 2 plantoirs, sécateur, binette, rateau, fourche-bêche, serfouette, 2 arrosoirs, 2 seaux + graines et plants bio (salades, radis, courges, carottes, haricots, pommes de terre, choux, tomates, aromatiques, fraisiers, framboisiers, groseillers, des fleurs). Si petit budget moins de 100 euros : fourche-bêche, houe, griffe, arrosoir et lancer une collecte de graines auprès du personnel et des familles !
1er cours: expliquer l’importance du sol et des bio-indicateurs (cours en salle + étude sur le terrain). Enrichissez-le avec du fumier naturel puis recouvrez votre sol pour l’hiver.
Conseil : Créer une parcelle témoin retournée mais sans couvre-sol pour observer la différence.
Au printemps : préparez vos semis en salle, et préparez votre sol de la façon suivante : – découvrez le sol – un coup de biogriffe ou grelinette pour décompacter (à la houe ou à la fouche -bêche mais sans retourner si vous n’avez que cela) – un coup de griffe pour retirer les restes de racine et les cailloux – un passage du râteau pour les semis fragiles (carottes) ou pour augmenter vos chances de rendement – utilisez du terreau (compatible agriculture bio) la première année pour vos semis, ensuite utilisez votre compost – paillez dès que les plants sont suffisamment grands pour ne pas être étouffés.
Pour le paillage : glaner dans les champs, les sous-bois selon la saison (paille, foin, feuilles mortes),acheter chez un maraîchers bio, utiliser la tonte de pelouse du collège ou de chez vous (laissez sécher en étalant et en retournant) ou faites-votre foin vous-même : laisser pousser de l’herbe à un endroit, organisez une démo de fauchage à la faux (ça s’apprend) avant que l’herbe monte en graine ou demander aux agents un coup de débroussailleuse, laissez sécher puis utiliser comme paillis (on reparlera du cycle de l’azote une autre fois)
Ensuite semer en pleine terre ou plantez directement selon le légume et la période. Pour les profondeurs et les distances, suivez les indications sur le sachet ou dans les livres, mais je vous conseille de semer assez serré pour plus d’intensivité et de créer des supports (avec des branches, des fers à béton, du grillage, des murets etc.) pour que les légumes (courges, haricots, petits pois surtout) poussent verticalement.
Commencez par les fèves, les ails et les oignons dès fin février, attention aux pommes de terre, aux courges et aubergines et aux haricots qui ne supportent pas le froid, pommes de terre doivent sortir de terre quand il n’y a plus de gel – début mai donc plantation en avril, le reste pas avant mai. (cf un calendrier de semis à l’année)
N’oubliez pas : laisser quelques salades, radis, bettes, betteraves et choux monter pour récoltez leurs graines (vous aurez le plaisir de voir leurs fleurs et les butineurs) , laissez aussi les plus gros haricots, fèves, petits pois pour ensuite récolter les graines et les faire sécher, quand vous mangerez une belle tomate, conservez et séchez toutes les graines, laisser quelques grosses pommes de terre dans le sol pour l’année suivante et conservez-en aussi une partie hors-sol dans un cageot…
ET APRES ?
Valorisation du projet : Prenez des photos régulièrement pour le site du collège et les portes ouvertes. Organisez une visite du jardin par les élèves eux-mêmes lors des portes ouvertes et convoquez la presse. Organisez un concours photo pour un concours ou une expo dans le collège… Donner les récoltes aux élèves qui ont participé enroulé dans du papier journal ou des sacs en carton. Organiser avec le chef de la cantine un cours de cuisine au cours duquel les élèves préparent leurs légumes et dégustent ensemble.
Eclatez-vous ! Aller dans le jardin dès que vous avez envie, pour prendre le soleil, méditez, lire, respirer. Inciter les autres collègues à faire de même. Invitez-les. Demander d’organiser des réunions dedans s’il y a une table et que le temps le permet. Ensuite ouvrez cet espace à tous les élèves sous la responsabilité d’un adulte avec des règles strictes : espace détente, ne pas piétiner, ne pas cueillir, ne pas faire de bruit.
Créer des liens avec vos enseignements : rendez vos cours concrets en emmenant des élèves dans le potager et en faisant de lui un véritable support d’étude
https://www.jardinons-alecole.org/definir-monter-projet-jardinage-ecole.html
A suivre la deuxième année : implanter un verger, un poulailler et/ou un rucher. Demander le label E3D. Engager une réflexion pour réduire l’impact carbone du collège tout entier (chauffage, déplacements, numérique…)
QUELQUES VIDEOS INSPIRANTES
Philipp Forer, montre qu’on peut cultiver sur des sols très pauvres grâce à des buttes, et surtout qu’il faut peu d’effort quand on a compris la permaculture
L’exemple du Bec Hellouin. montre qu’on peut être très intensif sans intrant chimique et sans grosse machine (sur 1000 m2 ils produisent autant que sur 10 000m2 en agriculture « productiviste »)
Fukuka a inspiré les premiers permaculteurs avec son concept d’agriculture sauvage
L’importance de conserver ses graines d’une année sur l’autre
BIBLIOGRAPHIE
L’agenda du jardinier bio (éditions Terre vivante), pour avoir une liste des travaux dans l’ordre, et pour des explications simples de mise en culture des différents légumes. Un guide très pratique : Le guide du jardinage biologique (JP Thorez). Un petit bouquin sympa sur la permaculture (parce que tant qu’à s’y mettre, autant le faire bien dès le début, même si on peut attendre un peu avant de passer les étapes « faire tous ses semis » -et ne pas trop acheter de plans-, et « récolter ses graines » (encore que sur certains légumes comme la tomates, c’est très simple) : Je débute mon potager en permaculture (collection « Je passe à l’acte »).
Le « traité RUSTICA du potager » est très complet et comporte des conseils d’association végétales. Le « petit traité RUSTICA du potager en carré » est intéressant pour ceux qui ont de petits espaces. La « Bible du jardin et du potager naturels » (Ed ESI) donne quelques conseils pratiques. Le hors-série « Détente et jardin » n°8 sur le jardinage naturel et les guides permet de faire une véritable mise à jour de nos connaissances par rapport à la permaculture. Enfin les guides « Terre vivante » sur les rotations dans le potager, l’association des cultures et les potions permettent de faire face à la plupart des situations.
Avec tout ça, y’a du quoi commencer, et après c’est passionnant !