Lettres contre la numérisation

Ces lettres sont librement reproduisibles et adaptables.

LETTRE AUX CHEF.FE.S D’ETABLISSEMENT

                                                                                                                           À … le …

Madame / Monsieur,

              Je vous adresse aujourd’hui ce courrier car je vais être dans quelques jours amené.e à corriger les copies de baccalauréat de nos élèves.

              Depuis……. ans au service de l’Education Nationale, j’ai été presque chaque année sollicité.e pour corriger des copies d’examen. C’est une tâche difficile, mais je m’en suis toujours acquitté.e avec plaisir et sérieux, conscient.e de l’importance de la mission qui m’était confié.e.

              Mais cette année, ces copies seront numérisées, et je vous écris aujourd’hui pour vous dire à quel point cette disposition nouvelle me bouleverse et me fait pressentir que je ne pourrai plus m’acquitter de cette tâche comme auparavant.

              Loin d’être anecdotique, il s’agit d’un changement majeur dans mes conditions de travail. J’ai choisi le métier d’enseignant.e pour l’aspect humain de ce métier. Or depuis dix ans le temps que je passe quotidiennement seul.e devant les écrans ne fait qu’augmenter et cesse d’être marginal. En effet, je suis censée à partir de cette année corriger au moins deux fois par an des lots de plusieurs dizaines de copies sur écran. Corriger une copie correctement prend 20 minutes au moins. Corriger 60 copies, entraîne donc de passer plus de 20h derrière un écran, avec les migraines, la fatigue oculaire, la sédentarité, les troubles du sommeil, articulaires et musculaires que cela entraîne. Ce ne sont plus les conditions de travail qui m’étaient promises quand j’ai embrassé ce métier. L’annonce de la rédaction en cours d’un Livre Noir du numérique par le syndicat majoritaire des personnels de direction me laissent croire que vous pâtissez vous aussi, comme nous et surtout comme nos élèves, de cette situation.

              D’autre part, et c’est pour moi encore plus grave, cette disposition fait partie des pratiques incompatibles avec la situation climatique actuelle. C’est une aberration écologique à tous points de vue (matériel, streaming, temps de connexion, stockage sur les data-centers …). Or rien ne justifie un tel gaspillage.

               D’un point de vue pédagogique, elle est même contre-productive car les élèves auront plus difficilement accès à leurs copies corrigées que si elles leur étaient tout simplement rendues en mains propres. Le discours qui nous a été tenu sur les prétendues économies d’énergie lié à la réduction des déplacements des professeur.e.s vers les centres d’examen ne me convainc absolument pas. S’il est prouvé que des économies sont bien réalisées à cette occasion, elles seront liées à l’organisation locale du bac et en aucun cas à la numérisation. C’est donc une dépense d’énergie qui pourrait sans aucun dommage être évitée : comment l’accepter alors ? Nous qui accompagnons la jeunesse vers l’avenir, nous qui savons à quel point cet avenir peut devenir sombre si nous ne mettons pas tout en œuvre pour préserver nos ressources et notre environnement, comment pouvons-nous commettre encore de telles erreurs ? C’est incompréhensible.

              Il m’est confié la tâche d’enseigner aux élèves le développement durable et de les préparer à la transition écologique, et donc à la sobriété énergétique. Comment pourrais-je, sans être en totale contradiction avec ces discours, accepter la numérisation des copies de bac ? Il s’agit là d’une injonction contradictoire, source de souffrance au travail, de perte de repères, de découragement.

              C’est pourquoi, au terme de ce courrier que je vous remercie d’avoir lu, je vous demande :

  • De m’autoriser à corriger sur papier les copies qui m’ont étéattribuées
  • De permettre à tous mes collègues qui le voudront de faire de même
  • De faire remonter à l’Inspection, au Rectorat et au Ministère la lettre ci-jointe, que je vous confie conformément au respect de la voie hiérarchique.

              Je vous prie d’agréer, Madame/Monsieur …, l’expression de ma très haute considération et de bien vouloir croire à mon attachement sans défaut au service public d’éducation.

                                     

LETTRE AUX RECTEURS / RECTRICES                                                                     

                                          A….., le………….

Madame / Monsieur la rectrice / le recteur de l’académie de ……..

              Par l’intermédaire de M. /Mme ….., chef.fe d’établissement, je vous adresse aujourd’hui ce courrier car je vais être dans quelques jours amené.e à corriger les copies de baccalauréat de nos élèves.

              Depuis……. ans au service de l’Education Nationale, j’ai été presque chaque année sollicité.e pour corriger des copies d’examen. C’est une tâche difficile, mais je m’en suis toujours acquitté.e avec plaisir et sérieux, conscient.e de l’importance de la mission qui m’était confié.e.

              Mais cette année, ces copies seront numérisées, et je vous écris aujourd’hui pour vous dire à quel point cette disposition nouvelle me bouleverse et me fait pressentir que je ne pourrai plus m’acquitter de cette tâche comme auparavant.

              Loin d’être anecdotique, il s’agit d’un changement majeur dans mes conditions de travail. J’ai choisi le métier d’enseignant.e pour l’aspect humain de ce métier. Or depuis dix ans le temps que je passe quotidiennement seul.e devant les écrans ne fait qu’augmenter et cesse d’être marginal. En effet, je suis censée à partir de cette année corriger au moins deux fois par an des lots de plusieurs dizaines de copies sur écran. Corriger une copie correctement prend 20 minutes au moins. Corriger 60 copies, entraîne donc de passer plus de 20h derrière un écran, avec les migraines, la fatigue oculaire, la sédentarité, les troubles du sommeil, articulaires et musculaires que cela entraîne. Ce ne sont plus les conditions de travail qui m’étaient promises quand j’ai embrassé ce métier.

              D’autre part, et c’est pour moi encore plus grave, cette disposition fait partie des pratiques incompatibles avec la situation climatique actuelle. C’est une aberration écologique à tous points de vue (matériel, streaming, temps de connexion, stockage sur les data-centers …). Or rien ne justifie un tel gaspillage.

               D’un point de vue pédagogique, elle est même contre-productive car les élèves auront plus difficilement accès à leurs copies corrigées que si elles leur étaient tout simplement rendues en mains propres. Le discours qui nous a été tenu sur les prétendues économies d’énergie lié à la réduction des déplacements des professeur.e.s vers les centres d’examen ne me convainc absolument pas. S’il est prouvé que des économies sont bien réalisées à cette occasion, elles seront liées à l’organisation locale du bac et en aucun cas à la numérisation. C’est donc une dépense d’énergie qui pourrait sans aucun dommage être évitée : comment l’accepter alors ? Nous qui accompagnons la jeunesse vers l’avenir, nous qui savons à quel point cet avenir peut devenir sombre si nous ne mettons pas tout en œuvre pour préserver nos ressources et notre environnement, comment pouvons-nous commettre encore de telles erreurs ? C’est incompréhensible.

              Il m’est confié la tâche d’enseigner aux élèves le développement durable et de les préparer à la transition écologique, et donc à la sobriété énergétique. Comment pourrais-je, sans être en totale contradiction avec ces discours, accepter la numérisation des copies de bac ? Il s’agit là d’une injonction contradictoire, source de souffrance au travail, de perte de repères, de découragement.

              C’est pourquoi, au terme de ce courrier que je vous remercie d’avoir lu, je vous demande :

  • De confirmer l’autorisation que j’ai sollicité à ma direction de corriger sur papier les copies qui m’ont étéattribuées
  • De permettre à tous mes collègues qui le voudront de faire de même
  • De faire remonter au Ministère la lettre ci-jointe, que je vous confie conformément au respect de la voie hiérarchique.

              Je vous prie d’agréer, Madame/Monsieur …, l’expression de ma très haute considération et de bien vouloir croire à mon attachement sans défaut au service public d’éducation.

LETTRE AU MINISTRE

                                                                                                                           À … le …

 Monsieur Blanquer, ministre de l’Education Nationale,

              Par l’intermédaire de M. /Mme ….., che.fe d’établissement et de M / Mme, le recteur / la rectrice d’académie, je vous adresse aujourd’hui ce courrier car je vais être dans quelques jours amené.e à corriger les copies de baccalauréat de nos élèves.

              Depuis……. ans au service de l’Education Nationale, j’ai été presque chaque année sollicité.e pour corriger des copies d’examen. C’est une tâche difficile, mais je m’en suis toujours acquitté.e avec plaisir et sérieux, conscient.e de l’importance de la mission qui m’était confié.e.

              Mais cette année, ces copies seront numérisées, et je vous écris aujourd’hui pour vous dire à quel point cette disposition nouvelle me bouleverse et me fait pressentir que je ne pourrai plus m’acquitter de cette tâche comme auparavant.

              Loin d’être anecdotique, il s’agit d’un changement majeur dans mes conditions de travail. J’ai choisi le métier d’enseignant.e pour l’aspect humain de ce métier. Or depuis dix ans le temps que je passe quotidiennement seul.e devant les écrans ne fait qu’augmenter et cesse d’être marginal. En effet, je suis censée à partir de cette année corriger au moins deux fois par an des lots de plusieurs dizaines de copies sur écran. Corriger une copie correctement prend 20 minutes au moins. Corriger 60 copies, entraîne donc de passer plus de 20h derrière un écran, avec les migraines, la fatigue oculaire, la sédentarité, les troubles du sommeil, articulaires et musculaires que cela entraîne. Ce ne sont plus les conditions de travail qui m’étaient promises quand j’ai embrassé ce métier.

              D’autre part, et c’est pour moi encore plus grave, cette disposition fait partie des pratiques incompatibles avec la situation climatique actuelle. C’est une aberration écologique à tous points de vue (matériel, streaming, temps de connexion, stockage sur les data-centers …). Or rien ne justifie un tel gaspillage.

               D’un point de vue pédagogique, elle est même contre-productive car les élèves auront plus difficilement accès à leurs copies corrigées que si elles leur étaient tout simplement rendues en mains propres. Le discours qui nous a été tenu sur les prétendues économies d’énergie lié à la réduction des déplacements des professeur.e.s vers les centres d’examen ne me convainc absolument pas. S’il est prouvé que des économies sont bien réalisées à cette occasion, elles seront liées à l’organisation locale du bac et en aucun cas à la numérisation. C’est donc une dépense d’énergie qui pourrait sans aucun dommage être évitée : comment l’accepter alors ? Nous qui accompagnons la jeunesse vers l’avenir, nous qui savons à quel point cet avenir peut devenir sombre si nous ne mettons pas tout en œuvre pour préserver nos ressources et notre environnement, comment pouvons-nous commettre encore de telles erreurs ? C’est incompréhensible.

              Il m’est confié la tâche d’enseigner aux élèves le développement durable et de les préparer à la transition écologique, et donc à la sobriété énergétique. Comment pourrais-je, sans être en totale contradiction avec ces discours, accepter la numérisation des copies de bac ? Il s’agit là d’une injonction contradictoire, source de souffrance au travail, de perte de repères, de découragement.

              Il ne s’agit pas ici d’un ressenti isolé : la numérisation est rejetée par de très nombreux collègues, comme en témoigne la pétition lancée par le collectif Enseignants Pour la Planète, qui a reçu en quelques jours la signature de plus de 1500 collègues. Dans les revendications concernant les aménagements souhaités à la réforme du baccalauréat, la numérisation est systématiquement citée.

              C’est pourquoi, au terme de ce courrier que je vous remercie d’avoir lu, je vous prie de bien vouloir revenir sur le dispositif de numérisation des copies d’examen.

              Je vous prie d’agréer, Monsieur le ministre, l’expression de ma très haute considération et de bien vouloir croire à mon attachement sans défaut au service public d’éducation.