En février dernier, lors du début de l’examen du projet de loi « pour une école de la confiance » à l’Assemblée nationale, Jean-Michel Blanquer postul[ait] «que l’école [était] la réponse la plus fondamentale à tous les défis posés par l’humanité », et notamment la transition écologique.
Nous devrions nous réjouir du rôle qu’accorde le ministre à l’école, face aux multiples enjeux environnementaux auxquels l’humanité fait aujourd’hui face… et pourtant, dans les faits, de nombreux obstacles vont à l’encontre de ces déclarations de principe.
En premier lieu, pour pouvoir penser les crises environnementales, il est nécessaire qu’elles soient abordées de manière honnête, notamment en s’adossant aux travaux scientifiques. Or pour que l’école puisse répondre à cet impératif, encore faut-il qu’elle ne soit pas ouverte aux lobbys et autres entreprises de « greenwashing ».
À travers quelques cas problématiques, nous aimerions ouvrir le débat sur certains acteurs qui interviennent dans les établissements scolaires.
Épisode 1 : le lobby de la viande
En dépit d’une pétition lancée il y a quelques années et ayant recueilli plus de 70 000 signatures, l’association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes (Interbev) continue d’intervenir dans les établissements scolaires. Labellisée par le gouvernement, elle a même déployé toute une offre « pédagogique », allant du primaire au secondaire.
Un petit tour sur le site de l’association nous apprend qu’un de ses objectifs est d’ « encourager la consommation » (de viande donc).

Si la consommation de viande recule en France, les français mangeaient encore en moyenne 136g de viande par jour en 2016, soit presque 50kg par année. Pourtant, Interbev souhaite pousser à la consommation…et pour cela intervient dans nos écoles.
Pourquoi faut-il s’en indigner ?
D’après les scientifiques du GIEC, pour éviter d’atteindre un réchauffement climatique supérieur à 2°, il importe de diminuer drastiquement, et dès maintenant les émissions de gaz à effet de serre (GES). Or l’élevage est à l’origine d’environ 14,5% des émissions mondiales de GES !
En France, à l’occasion de la COP 21, une étude du centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique a montré qu’en France, l’agriculture est le troisième secteur le plus polluant, derrière les transports et la construction.
La production de viande est aussi extrêmement consommatrice en eau (7000 litres d’eau pour 500g de bœuf)
Une étude publiée en octobre 2018 dans la revue Nature affirmait que les occidentaux devaient diminuer de 90% leur consommation de viande pour réduire l’impact environnemental de leur alimentation.
Enfin, alors que l’association L214 met régulièrement en lumière les conditions monstrueuses dans lesquelles sont traités les animaux dans certains élevages et abattoirs, on peut légitimement s’interroger sur les ateliers d’Interbev invitant les enfants à réfléchir, en étudiant un « paysage agricole », aux thématiques « de l’environnement et du bien-être animal »…

(capture d’écran)
Si l’école est « la réponse la plus favorable » à la transition écologique, il faut qu’elle informe sur l’impact environnemental réel de nos consommations alimentaires…et pour cela qu’elle cesse d’accueillir le lobby de la viande.